Kate Tempest rend ses lettres de noblesse au rap, perdu dans les méandres du bling-bling, avec des textes ciselés et engagés.
A mi-chemin entre le rap et le slam, la poétesse (elle a remporté un prestigieux prix, le Ted Hugues Award, en 2013 dans son pays, le Royaume-Uni) Kate Tempest s’impose clairement comme une digne successeur de Patti Smith. Ouais, ça nous change de Jul dans nos contrées.
Très engagée, notamment dans son dernier album « Let them eat chaos », la chanteuse s’empare de sujets graves comme les attentats (« Europe is lost »), la drogue (« Ketamine for breakfast »), la gentrification (« Perfect coffee ») ou encore l’environnement, l’individualisme, etc. Alternant de temps à autre avec des morceaux plus légers tenant de la fiction comme l’ouverture de l’album « Picture a vaccum » où elle raconte la vie de sept habitants de Londres et de leurs problèmes, que l’on suivra tout au long de l’album. C’est certainement ce qu’on apprécie le plus chez Kate Tempest, sa capacité nous raconter une histoire et dénoncer les dérives de son temps, mais toujours dans un langage clair et, souvent, mordant (The people are dead in their lifetimes/Dazed in the shine of the streets/But look how the traffic’s still moving/System’s too slick to stop working, « Europe is lost »).
Et côté musical ? Le verbe de Kate Tempest étant sa principale force, son producteur, Dan Carey (Franz Ferdinand), a choisi d’accompagner son flow avec une rythmique simple et quelques synthés plus froids et mécaniques. Et l’effet est parfait, magnifiant la diction incroyable de la rappeuse, aussi bien quand déclame simplement son poème que lorsqu’elle part dans une véritable transe et que la rythmique s’emballe avant de laisser les notes suspendues dans le temps, bloquant la respiration de son auditeur. Kate a bien choisi son pseudo. La tempête de mots, de sentiments contradictoires, le bouillonnement intellectuel qu’elle inflige à tous ceux qui l’écoute pousse à réfléchir sur ce que l’on fait. Et surtout ce qu’on ne fait pas.